Voitures
Les Constructeurs Chinois Se Tournent Vers l'Europe : Une Nouvelle Ère de Production Automobile
2025-08-13

Le paysage de l'industrie automobile mondiale est en pleine mutation. Alors que les constructeurs chinois ont longtemps dominé la production à bas coût, l'Europe, avec ses nouvelles réglementations et incitations, est en train de devenir un pôle d'attraction majeur pour la relocalisation. Cette évolution stratégique est dictée par la nécessité d'optimiser les coûts, de s'aligner sur les exigences environnementales européennes et de réduire l'impact des droits de douane croissants. Ce mouvement, initié par des marques comme Volvo, marque un tournant significatif, promettant de transformer les chaînes d'approvisionnement et de créer de nouvelles opportunités industrielles sur le vieux continent. Il s'agit d'une réponse pragmatique aux défis économiques et géopolitiques actuels, dessinant les contours d'une nouvelle ère pour la fabrication automobile en Europe.

Les Fabricants Asiatiques Redessinent Leur Stratégie de Production en Europe

Le 13 août 2025, une décision majeure a été annoncée, symbolisant un virage stratégique pour l'industrie automobile : le modèle Volvo EX30, initialement assemblé en Chine, sera désormais produit en Belgique. Cette initiative, portée par le groupe sino-suédois Volvo et sa maison mère Geely, s'est concrétisée par un investissement conséquent d'environ 200 millions d'euros dans l'usine de Gand. Aux côtés des XC40, EC40, EX40 et V60, l'EX30 bénéficiera d'une ligne de production dédiée, complétée par une nouvelle unité d'assemblage de batteries, bien que les modules proviennent toujours de Chine. Plus de la moitié des fournisseurs européens sont déjà impliqués dans la fabrication de l'EX30, et leur nombre devrait augmenter dans les mois à venir.

Cette relocalisation, prévue dès le lancement du modèle en décembre 2023, est une démarche stratégique pour Volvo. Elle vise notamment à rendre l'EX30 éligible aux primes écologiques en France et dans d'autres pays européens, en utilisant des matériaux d'origine locale. Cependant, la principale motivation de ce rapatriement est d'éviter les droits de douane de 28,8 % imposés par la Commission européenne sur les véhicules électriques chinois depuis novembre 2024. Ces taxes, qui varient de 17 % pour des marques comme BYD à 18,8 % pour le groupe Geely, rendent la production en Chine moins attrayante pour le marché européen.

L'ancien PDG de Volvo, Jim Rowan, avait déjà souligné en septembre 2024 que la production européenne de l'EX30 serait économiquement neutre. En effet, les économies réalisées sur les frais de logistique et de stockage (environ 10 % du prix du véhicule) compensent les coûts de production locaux, permettant de maintenir une marge bénéficiaire de 15 à 20 %.

Cette tendance à la relocalisation ne se limite pas à Volvo. Le 12 juin dernier, l'ancien ministre français de l'Économie, Bruno Le Maire, avait encouragé l'arrivée des constructeurs chinois en Europe, suggérant des transferts de technologie et l'utilisation de sous-traitants locaux. Chery a devancé l'appel en étant le premier constructeur chinois à implanter une unité de production de véhicules légers en Europe. En Espagne, des SUV Chery rebadgés sont déjà assemblés dans l'ancienne usine Nissan de Barcelone, avec 2 821 unités vendues au cours des cinq premiers mois de l'année.

BYD, désormais le leader mondial des véhicules électriques, prévoit également d'ouvrir une usine en Hongrie, à Szeged, d'ici fin 2025, où seront produits des modèles destinés au marché européen, comme la récente Dolphin Surf. Une autre usine BYD est envisagée en Turquie. Quant à MG, un autre poids lourd chinois, la réflexion sur une implantation locale est en cours.

Les efforts européens pour freiner l'expansion des importations chinoises de véhicules électriques semblent porter leurs fruits. En 2024, les importations de véhicules électriques chinois en France ont chuté de 48,2 % (58 126 unités), et de 9 % pour l'ensemble des pays fournisseurs. Cependant, les droits de douane ne s'appliquent qu'aux véhicules électriques, laissant les hybrides, très prisés sur le marché français, exemptés de ces surtaxes. Cela pourrait potentiellement entraîner une augmentation des importations de véhicules hybrides chinois.

L'Europe à la Croisée des Chemins : Entre Stratégie Industrielle et Protectionnisme

Le mouvement de relocalisation des constructeurs automobiles chinois en Europe est une manifestation claire des dynamiques économiques et géopolitiques complexes qui façonnent notre monde. Pour l'Europe, c'est à la fois une opportunité et un défi. L'arrivée de nouvelles usines crée des emplois, stimule l'économie locale et favorise les transferts de technologies. Cependant, elle soulève également des questions sur la réciprocité, les normes environnementales et la protection de l'industrie automobile européenne. L'Europe doit maintenant définir un cadre strict et équitable pour ces investissements, évitant de répéter les erreurs du passé où les constructeurs européens se sont parfois \"brûlé les ailes\" en Chine. Il est essentiel d'assurer que ces relocalisations profitent à l'Europe dans son ensemble, tout en maintenant une concurrence saine et loyale sur le marché. C'est une danse délicate entre l'ouverture économique et la préservation des intérêts stratégiques, qui façonnera l'avenir de l'industrie automobile du continent.

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